samedi 3 avril 2010

Cancer du col de l'utérus : le vaccin GARDASIL

L’an dernier, c’était le dernier truc in, celui que tout le monde faisait, et devait faire : le vaccin contre le cancer du col de l’utérus. J’étais sincèrement persuadée qu’il était capital de recevoir ce vaccin, et qu’effectivement, avec lui, je n’aurais aucun risque d’avoir un cancer du col de l’utérus. Quand au risque potentiel du vaccin lui-même, il ne m’a même pas effleuré l’esprit. Mais après quelques recherches, il semblerait que le GARDASIL ne soit pas aussi efficace et sûr que l’on voudrait bien nous le faire croire. Explications.

Tout d’abord, c’est un vaccin contre QUOI ? Le terme de « vaccin contre le cancer du col de l’utérus » est erroné. Les publicités disent d’ailleurs que leur produit protège contre le Virus du papillome humain (PVH), qui est une MST. Or, lorsque l’on a cette infection, elle peut provoquer l’apparition de cellules précancéreuses (qui ne sont pas des cellules cancéreuses) qui, au bout d’une longue période de temps qui peut aller jusqu’à 30 ans, pourront effectivement causer un cancer du col de l’utérus. 400 femmes chaque année meurent encore de ce type de cancer. Cependant, le PVH est une infection qui a plus de 200 souches différentes, et toutes les formes n’ont d’ailleurs pas été identifiées.

GARDASIL protège contre 4 formes du PVH, dont seulement deux peuvent aboutir à un cancer du col de l’utérus. Or, de toutes les femmes qui ont été infectées par le PVH, seulement 2,3% d’entre elles l’ont été par les deux formes dont protège le vaccin.
De plus, le PVH est l’une des infections qui s’attrape le plus facilement : pratiquement toutes les femmes ont été au moins une fois infectées. Mais c’est également l’une des infections qui est le plus facilement éliminé de façon spontanée par le système immunitaire : dans 90% des cas, même pour les formes les plus dangereuses, le corps guérit tout seul.

De plus, il y a une alternative au vaccin, qui est moins dangereuse et plus sûr : le test Pap, que chaque femme devrait effectuer chaque année, et qui permet de prévenir de nombreux cancers, étant donné que les cellules précancéreuses mettent plusieurs années à devenir cancéreuses. Ainsi, au lieu de financer la campagne de publicité de la firme Merk (impliquée d’ailleurs dans plusieurs scandale, mais c’est une autre histoire), il serait peut-être plus judicieux de faire la promotion de test Pap, gratuit et sans danger.
Car, oui, le vaccin comporte des risques. Comme tous les vaccins et les médicaments, d’ailleurs. Les effets secondaires potentiels sont quelque chose de connus et de largement admis… tant qu’ils restent peu importants. Or, les effets secondaires du GARDASIL sont importants. Jusqu’à présent, CBS News recense, dans le monde, 29 morts de jeunes femmes liées au GARDASIL, sans compter celles qui n’ont pas été reconnues comme victimes du vaccin. Mais en plus de ces décès, il y a un peu plus de 2000 jeunes filles qui ont été hospitalisées et qui n’ont toujours pas retrouvées la santé (un rapport du National Vaccine Information Center, un organisme de surveillance pharmaceutique indépendant, totalise plus de 5000 passages aux urgences). Cela fait beaucoup de risque pour une infection dont la probabilité qu’elle aboutisse à un cancer est si basse et surtout avec l’existence d’un test de dépistage fiable et gratuit.

Au final, j’ai décidé que je ne me ferais pas vacciner. Et pourquoi le faire ? En dépit de ce que les campagnes publicitaires veulent bien nous faire croire, il n’y a pas d’urgence. Oui, le cancer du col de l’utérus tue aujourd’hui 400 femmes chaque année, mais non seulement le chiffre a régressé ou est resté stable selon les régions du monde (dans les pays développés du moins), il n’y a donc pas d’épidémie qui justifie l’ampleur de la campagne d’information, mais en plus, le PVH ne suffit pas pour causer un cancer, une maladie déjà existante comme le VIH, ou simplement une mauvaise hygiène de vie sont des terrains qui permettent à l’infection de faire son travail.

Mais il est dur de défendre cette opinion, car aujourd’hui, on ne remet plus en cause les « décrets » médicaux, et en particulier ceux qui viennent des grandes compagnies pharmaceutiques. Mais le mécontentement est de plus en plus palpable, aussi bien parmi les simples citoyens que parmi des médecins. C’est la magie d’internet : c’est un outil formidable qui peut parfois nourrir la paranoïa, mais surtout qui permet à l’information de circuler, et aux gens de prendre du recul par rapport à ce qu’on veut bien leur dire. L’article est parsemé de liens, pour vous donner mes sources (ce n’est pas un délire personnel !) mais aussi pour vous inviter à faire vos propres recherches et vos propres opinions.


POUR EN SAVOIR PLUS

Le réseau québécois d'action pour la santé des femmes se mobilise

Le NY Times a publié un article, "The evidence Gap", qui a été partiellement traduit et commenté par Pharmacritique, qui fait également un lien vers l'article original en anglais. Il y a par ailleurs plusieurs autres articles sur le GARDASIL sur le site, plein de références !

La monographie complète du vaccin publiée par la firme Merk Frosst

jeudi 1 avril 2010

Tu t'es vu quand t'as bu ?


Le 9 mars derniers, les députés français ont adopté le projet de loi visant à interdire la consommation d’alcool pour les mineurs. L’interdiction pour les moins de 16 ans existait déjà – et n’était déjà pas respectée. Cependant, entre 16 et 18 ans, la vente d’alcools non forts était autorisée. Pour ma part, je ne me sens pas du tout concernée par ce projet de loi : je ne bois pas, par goût plus que par conviction d’ailleurs. En France, certains considèrent ce projet comme inutile : 18 ans ou pas, un jeune qui veut boire boira. Surtout que l’interdit représente un certain attrait pour pas mal d’ado. De plus, les jeunes sont lassés d’être considérés comme des irresponsables qui boivent et fument pour suivre le “troupeau” des copains. Marre d’être tous mis dans le même panier. D’autres, en revanche, s’affolent des chiffres de comas éthyliques. A même pas 15 ans, le nombre d’adolescents qui a déjà été saoûl est élevé – et effrayant. A seulement 11 ans, 59% des français ont déjà bu de l’alcool. A 13 ans, 16% ont déjà été ivre. Le chiffre grimpe à 41% pour les jeunes de 15 ans. C’est pourquoi d’aucuns pensent qu’il faut absolument encadrer la vente et la consommation d’alcool pour éviter les drames.

Tout ça pour en arriver à la façon dont ça fonctionne au Québec. Lors de ma première visite, en vacance avec mes parents, j’avais 17 ans. Je n’étais donc pas majeure, ni en France, encore moins au Canada. Comme cela arrivait très souvent en France, mes parents m’ont demandé d’aller leur acheter deux bouteilles de bière pour la soirée. Naturellement, l’alcool était pour eux. Je me souviendrais longtemps des yeux écarquillés du vendeur qui a refusé catégoriquement de me vendre la moindre goutte d’alcool. D’autant plus que lorsqu’il m’avait demandé mon âge, j’avais bien sûr dit la vérité. Mon accent français m’a sauvé, mais l’épisode est maintenant dans l’histoire familiale et continue de nous faire rire. Et pourtant, la France prend le même chemin puisque la vente d’alcool à toute personne qui n’est pas majeure est maintenant interdite en France aussi. Mais la différence principale est que les commerçants québécois appliquent la loi, eux !

Et pourtant, je me demande vraiment si l’interdiction est la bonne solution. Les jeunes trouvent toujours le moyens de se procurer l’alcool qu’ils veulent. En falsifiant les cartes d’identité, ou tout simplement en demandant à un majeur. Mais même si les chiffres français de la consommation des adolescents font peur, je trouve que laisser aux jeunes une certaine autonomie est important. La plupart d’entres eux font peut-être un ou deux excès, mais cela leur permet aussi de connaître leurs limites, et de les respecter par la suite. Grâce à ça, ils savent boire. Une amie m'a raconté une anecdote. Alors qu’elle avait 17 ans, sa classe a fait un échange scolaire avec une classe d’un lycée américain. Quand lesdits américains sont venus en France, ils ont été ravis par la facilité de se procurer de l’alcool. A tel point que plusieurs d’entre eux ont beaucoup trop bu et qu’une jeune fille s’est retrouvé à l’hôpital dans le coma. Selon mon amie, l’explication est simple : ils ne savaient pas boire et ne connaissaient pas leurs limites.

C’est toujours un débat difficile. Faut-il protéger les jeunes d’eux-même, tout en sachant que de toutes façons ils trouveront toujours le moyens de contourner l’interdiction, ou faut-il leurs faire confiance, en sachant que le verre de trop peut avoir des conséquences dramatiques voire irréparables ?

lundi 29 mars 2010

Visiteurs du futurs

Dépêche de Agence Science-Presse

« Si des visiteurs du futur débarquent en 2009, que nous apporteront-ils comme cadeau? Cette question, le magazine The New Scientist en a fait son concours de fin d’année, et un bon nombre des réponses reflètent l’inquiétude face à l’avenir de l’environnement. «Un ours polaire», a suggéré un lecteur. Une bouteille de «Chateau DuRant», vin rouge de l’Antarctique. Et une lettre de Son Altesse Impériale Bush IV, nous assurant qu’il n’y a pas de raisons de s’inquiéter: «il y a encore beaucoup de pétrole à découvrir».

Et dans le même esprit, si de tels visiteurs d’un lointain futur étudient nos communications électroniques avant de venir nous voir, ils en concluront que les deux cadeaux que nous désirons le plus recevoir d’eux sont : un remède pour accroître la longueur et la performance de vous-savez-quoi; et une lettre d’un citoyen altruiste prêt à transférer ses millions de dollars dans notre compte de banque. »

dimanche 28 mars 2010

Chasse au pape

Autant il y a quelques jours je partageais l’avis général et j’étais assez remontée contre l’Eglise, autant je partage aujourd’hui l’avis du Chafouin qui, dans un article fort bien écrit, s’insurge contre la condamnation systématique du pape quoiqu’il fasse ou dise. Les médias sont souvent les as de la désinformation et de la déformation des propos de tout un chacun et les journalistes cherchent absolument à avoir « la petite phrase », celle qui fera un titre percutant, simple, et lourd de sens. Or, les choses sont rarement assez simples pour être réduites à cette petite phrase.

Voici donc le dernier scandale, le petit truc à la mode pour taper sur le pape et l’Eglise catholique (qui est un sport fort apprécié, avouons-le) : les propos du pape à propos des préservatifs en Afrique. Généralement, on s’arrête là : Eglise + préservatif + Afrique = un article juteux sur une religion restée bloquée au Moyen-âge en perspective. Tout un chacun sait (ou croit savoir) que l’Eglise est opposée à la contraception et à l’avortement, ce qui est criminel dans un continent ravagé par ce fléau qu’est le Sida. Le pape n’est qu’un illuminé vieillissant et il faudrait être fou pour lui accorder le moindre crédit. Et bien vous allez rire, mais non !

Déjà, le pape est loin d’être un vieux gaga. Henri Tincq, journaliste spécialiste des questions religieuses, explique ainsi dans cet article qu’il possède une intelligence et une érudition qui sont très largement reconnue. Mais il échoue pour ce qui est de s’entourer des bonnes personnes et pour communiquer par les moyens modernes, Internet au premier plan.

Ensuite, le pape n’a pas condamné l’usage du préservatif lors de ses allocutions sur le continent africain. Un journaliste a interrogé Benoit XVI sur les moyens de lutte contre le sida en critiquant la vision catholique des choses. La réponse fut la suivante :
«Je dirais le contraire: je pense que la réalité la plus efficace, la plus présente sur le front de la lutte contre le sida est précisément l'Eglise, avec ses mouvements et ses différentes réalités (...) Je dirais qu'on ne peut pas surmonter ce problème du sida uniquement avec des slogans publicitaires. Si on n'y met pas l'âme, si on n'aide pas les Africains, on ne peut pas résoudre ce fléau par la distribution de préservatifs : au contraire, le risque est d'augmenter le problème.
La solution ne peut se trouver que dans un double engagement : le premier, une humanisation de la sexualité, c'est-à-dire un renouveau spirituel et humain qui apporte une nouvelle manière de se comporter l'un avec l'autre, et le deuxième, une amitié pour les personnes qui souffrent, la disponibilité, même au prix de sacrifices, de renoncements, à être proches d'eux. Tels sont les facteurs qui aident et qui conduisent à des progrès visibles. J'exprimerai donc en Afrique cette double nécessité de renouveler l'homme intérieurement, de lui donner une force spirituelle et humaine pour un juste comportement à l'égard de son propre corps et de celui de l'autre, et de souffrir avec ceux qui souffrent, rester présents dans les situations d'épreuve. C'est la juste réponse, et c'est ce que fait l'Eglise, offrant une contribution très grande et importante.»

C’est tout de suite beaucoup plus complexe que le simple, mais efficace, « Benoit XVI interdit le préservatif en Afrique » que l’on nous assène. Comme le dit le Chafouin, c’est un véritable lynchage en règle. On ne réfléchit plus, on condamne. On jette l’anathème sur toute l’institution catholique sans même se renseigner sur les propos exacts du pontife et les nuances de sa pensée. Simple citation de l’article d’Henri Tincq :
«Le désaveu sans nuance et l'exécution sommaire sont des méthodes d'autant plus insupportables que la connaissance des dossiers est médiocre, l'information incomplète, partiale et biaisée, l'interprétation expéditive, la répétition des mêmes mots abusive. C'est le règne de la doxa - c'est-à-dire d'une opinion médiatique dominante contre laquelle, au nom du «politiquement correct», personne n'ose s'insurger - ; celui de l'amalgame qui, pour entretenir les fonds de commerce de la polémique, mélangent des affaires qui n'ont pas toujours à voir entre elles. A cet égard, le pape n'est pas plus épargné que le sont les personnalités politiques civiles ou que l'ont été ses propres prédécesseurs. »

Deuxième round. J’avais été relativement claire sur ce que je pensais du drame qu’à subit la fillette brésilienne et la réaction absolument effarante d’un évêque brésilien et du cardinal Giovanni Battista Re. Mais là encore, il faudrait voire à nuancer. Deux imbéciles ne doivent pas faire condamner tous les catholiques. Les évêques du Brésil ont désavoué publiquement l’excommunication prononcée et le Vatican leur a emboîté le pas. Mgr Fisichella a également été très clair dans un article intitulé « Du côté de la fillette brésilienne » parut dans La Croix : « Il n'y a pas de mot adéquat pour condamner de tels épisodes, et les sentiments qui en découlent sont souvent un mélange de colère et de rancoeur qui ne s'apaisent que lorsque justice est réellement faite, et lorsque la peine infligée au délinquant en cause est sûre d’être purgée. (…) Avant de penser à l'excommunication, il était nécessaire et urgent de sauvegarder sa vie innocente et de la ramener à un niveau d'humanité dont nous, hommes d'Église, devrions être experts et maîtres dans l'annonce » écrit-il. Il aborde aussi les questions d’éthique auxquelles les médecins sont perpétuellement confrontés, leur professionnalisme qui nous interdit de penser qu’ils ont pris leurs décisions avec désinvolture. Il conclut en réaffirmant le soutien de l’Eglise à la fillette, sa famille, et les personnes qui l’ont aidé, précisant que ce sont « d’autres personnes qui méritent l’excommunication et notre pardon » (je supprimerai bien la partie sur le pardon, mais ce ne serait plus l'Eglise !).

Mais, comme l’explique très bien une fois encore le Chafouin dans ce billet, cette réaction a été trop longue. Dix jours se sont écoulés avant de pouvoir lire ces lignes, dix jours qui laisseront des traces que les mots n’effaceront pas. Benoit XVI est devenu le nouvel homme à abattre. A ce rythme, et avec autant de scandales en si peu de temps, je me demande si l'image de l'Eglise sera sauve.
Je suis, personnellement, agnostique. Et j'ai tendance à penser qu'on a de bonnes raisons de faire des reproches à l'Eglise catholique et au pape en particulier. Mais tant qu'à critiquer, autant le faire pour de bonnes raisons, par honnêteté, et puis parce qu'à critiquer tout le temps sans prendre la peine de vraiment chercher les informations et de les analyser, on finit par se discréditer totalement.

vendredi 27 mars 2009

La couleur de la justice

« Les discriminations judiciaires et policières en France » étaient le thème d’une conférence organisée par le Centre international de criminologie comparée (CICC) de l’Université de Montréal le 18 mars dernier. Thème est récurrent dans l’Hexagone lors des débats sur ces deux institutions. Dans quelle mesure la police et la justice créent-elles et perpétuent-elles des discriminations à l’égard des populations immigrées ou tout simplement des gens de couleurs ?

Discrimination ethnique

La perpétuation des discriminations est l’objet de l’étude de Fabien Jobard, docteur en science politique et chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) de Paris. Il travaille principalement sur la police, au centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, et a publié plusieurs ouvrages et articles sur la question. Son constat est clair : si l’institution judiciaire ne produit pas de nouvelle discrimination, elle perpétue celles qui sont créées par la société et qui sont plus présentes au sein de la police.

Pour un juge, des éléments comme la nature du délit ou les antécédents du prévenu priment sur l’origine ethnique de l’individu. En revanche, des considérations telles que le sexe, l’origine et le style vestimentaire jouent d’avantage pour les policiers dans les contrôles d’identité. 8% de la population française est composée d’immigrés. Or, ces derniers représentent 20% des personnes interpellées par la police, un quart des personnes condamnées par un juge, et un tiers de la population carcérale. C’est sans compter les français dont les parents ou les grands-parents sont des immigrés naturalisés et qui font aussi les frais de la discrimination dans la société en général.

Justice et discrimination

Fabien Jobard s’est intéressé dans un premier temps à la question suivante : est-ce que l’origine ou la couleur de peau influencent les juges ? La réponse qu’il donne est négative. Sa recherche porte sur les outrages, les rebellions et les violences à l’encontre des policiers. C’est un bon sismographe des tensions qui règnent entre les forces de police et la population, essentiellement les jeunes des banlieues. Cet indice a doublé dans les années 90, et a été encore une fois multipliée par deux depuis lors.

Selon les recherches qu’il a menées sur 864 dossiers étalés de 1965 à 2005, près de 63% des prévenus étaient des Européens, 20% étaient Maghrébins et 15,5% étaient des Noirs africains. Or, en examinant les statistiques des sanctions, il s’avère que le risque d’écoper d’une peine de prison ferme est deux fois plus important pour les Africains que pour les Européens. Est-ce pour autant de la discrimination ? D’autres données entrent en ligne de compte. Par exemple, le type de délit : les peines sont plus sévères pour un acte de violence que pour un outrage. La récidive est également importante : si la personne interpellée n’en est pas à sa première fois, elle passe en « comparution immédiate », c’est-à-dire qu’il est déferré devant le juge le jour de son interpellation ou le lendemain. Or, dans ces cas là, les peines constatées sont plus importantes. Enfin, il y a la présence au cours de l’audience. Si le prévenu est absent sans pouvoir fournir d’excuse valable, cela a également tendance à accroître la sévérité du juge. Finalement, selon Fabien Jobard, quand on recoupe les données, le facteur de l’origine ethnique disparaît. Ce sont d’autres éléments – la violence, la récidive, l’absence devant le juge – qui sont déterminants. La justice s’exerce donc sans tenir compte des origines ou de la couleur de peau de la personne jugée. Cependant, M. Jobard émet une réserve : la justice ne crée pas de discriminations, mais elle ne corrige pas non plus celles qui précèdent son office. De plus, les policiers compliquent parfois un outrage en portant plainte pour préjudice moral, et cela arrive plus souvent quand le prévenu est Africain que quand il est Européen. Avec cette nouvelle donnée, l’origine ethnique a une incidence, même si elle reste relativement faible.

Police et minorités visibles

Dans la deuxième partie de son travail, il porte son attention sur les policiers. Il raconte que pendant près de six mois, à plusieurs endroits de la capitale française, des policiers effectuant des contrôles d’identité ont été suivis et observés à leur insu, afin de recueillir des données statistiques.

D’après l’article 78.2 du Code de procédure pénale français, les policiers peuvent interpeller la personne de leur choix pour effectuer un contrôle. C’est d’autant plus vrai depuis que le terrorisme est devenu une priorité pour la plupart des gouvernements. L’article de loi précise cependant que ces contrôles doivent être motivés par le soupçon que la personne concernée a commis ou va commettre une infraction, un délit ou un crime. Ces contrôles semblent toutefois, d’après le chercheur, ne pas suivre la même logique : tout d’abord, les Noirs et les Maghrébins sont surcontrôlés. Ensuite, la plupart des personnes contrôlées ne portaient pas de sac, alors justement qu’un gros sac est suspect car il peut cacher beaucoup de choses. Enfin, le style vestimentaire influait aussi sur les choix des policiers. Les jeunes hommes habillés hip hop étaient ainsi surcontrôlés. Mais quand on croise les données, M. Jobard émet des doutes : difficile de savoir si le facteur le plus important est la couleur de peau ou le style vestimentaire, donc de savoir sur quoi exactement porte la discrimination. D’autant plus que les résultats obtenus sont très différents selon les lieux dans lesquels se sont rendus les chercheurs. Les variations sont trop fortes pour pouvoir faire des affirmations.

Il conclu ainsi : « Au final, les analyses tant pénales que civiles montrent que si discrimination il y a, il est assurément très difficile de dégager une discrimination directe, assumée, volontaire. Toute la mécanique judiciaire renforce ces dernières années les effets de clientèle. En d’autres termes, la probabilité qu’un condamné soit à nouveau condamné et que la prison ne soit jamais promise qu’aux ex-détenus est renforcée. Cet effet clientèle se superpose indéniablement aux origines: la justice française a contre elle l’évidence des apparences, celles d’une justice discriminatoire. »

Article pour Reflet de Société

mardi 24 mars 2009

Le micro-crédit

Prix Nobel de la paix 2006 : Muhammad Yunus

En 2006, le bangladais Muhammad Yunus a reçu le prix Nobel de la paix. Ce qui a pu surprendre ceux qui le connaissaient déjà : Yunus est en effet un économiste. Né en 1940 dans ce qui était encore à l’époque une partie de l’Inde sous colonisation anglaise, il étudie d’abord près de chez lui. Il visite cependant pendant sa jeunesse l’Amérique du Nord, l’Europe, et une partie de l’Asie.

En 1957, il part à l’université de Dakha étudier l’économie, obtient son diplôme et devient enseignant. Il s’essaie à diriger une entreprise, et rencontre le succès. Mais il décide finalement de partir étudier aux États-Unis, où il obtient son doctorat.

Il restera pour travailler, mais en 1971 éclate la guerre de libération du Bangladesh. Muhammad Yunus soutient les indépendantistes et s’implique. Il rentrera finalement chez lui en 1972, quelques mois après la déclaration de l’indépendance du Bangladesh.

Une banque pour le développement : la Grameen Bank

Il occupe alors le poste de responsable du département d’économie de l’université de Chittagong. La pauvreté qui règne le choque : « Une terrible famine frappait le pays, et j’ai été saisi d’un vertige, voyant que toutes les théories que j’enseignais n’empêchaient pas les gens de mourir autour de moi. »

En étudiant la situation des pauvres, il en vient finalement à la conclusion que le principal problème vient du fait qu’ils n’ont pas accès à des capitaux. Les banques refusent de prêter et les usuriers locaux pratiquent des taux d’intérêts à la limite de l’indécence. L’idée germe alors. En utilisant son propre argent, il propose à quelques villageois des « micro-prêts » de quelques dollars, dont les conséquences s’avèrent très positives. En 1977, il crée finalement sa propre banque, la Grameen Bank, qui se consacre au micro-crédit.

Le micro-crédit : qu’est-ce que c’est?

Le fonctionnement est relativement simple. Lors de ses recherches, Yunus a rencontré un groupe d’artisans ayant besoin de 27 dollars pour acheter du bambou. Les banques refusaient de prêter une si petite somme à des clients soi disant insolvables. Yunus a finalement prêté les 27 dollars de sa propre poche, ce qui a permis aux artisans d’acheter le bambou, donc de produire, et même de créer de nouveaux emplois. Ils ont remboursé le prêt sans difficulté. C’est là tout le principe du micro-crédit.

La Grameen Bank propose à des artisans ou entrepreneurs à l’échelle locale des petits prêts à taux d’intérêt nul, ce qui leur permet de financer leurs activités et d’entrer dans une dynamique de production et de profit. L’impact sur le développement social est considérable car le micro-crédit profite à divers secteurs et directement aux plus pauvres qui peuvent alors améliorer leur situation économique par leurs propres moyens.

Cela a également permis l’accès aux services sociaux de bases, ainsi que la revalorisation de la place et du travail de la femme dans plusieurs pays en développement, car ce sont les femmes qui utilisent en majorité ce système de prêt. Le micro-crédit est donc un vecteur de pacification social et d’amélioration de la vie de ses utilisateurs.

C’est pour cela que Muhammad Yunus et son institution la Grameen Bank ont reçus en 2006 le prix Nobel de la paix. La Grameen Bank a soutenu quelques 2,4 millions d’emprunteurs. Selon la Banque mondiale, il y aurait maintenant près de 10 000 institutions de micro-crédit dans 85 pays qui brassent 30 milliards de dollars. Environ 300 millions de personnes dans le monde en bénéficient.

Profiter de la crise économique pour changer le monde

Muhammad Yunus est intervenu ce mardi 19 mars à Tokyo, où il a estimé que la crise financière était une opportunité pour changer le fonctionnement du monde de la finance à l’échelle mondiale en faveur des plus démunis.

Dans le journal Le Monde, il a ainsi déclaré : « Le système financier doit être entièrement repensé. Il ne fonctionne pas pour le peuple de toute façon ! Pour les riches, oui ! Les grandes entreprises, oui ! Mais pas pour le peuple […]. Un petit nombre de personnes d’un seul pays avaient créé une situation désastreuse pour le monde entier, [ce qui démontre] la fragilité du système capitaliste actuel. »


Article écrit pour Reflet de Société

samedi 21 mars 2009

Juste pour rire [2]

Dans le cadre de fouilles dans le sous-sol russe jusqu'à 100m de profondeur, les scientifiques russes ont trouvé des vestiges de fil de cuivre qui datait d'environ 1000 ans. Par provocation les Russes en ont conclu publiquement que leurs ancêtres disposaient déjà il y a 1000 ans d'un réseau de téléphone en fil de cuivre.

Les Américains, pour faire bonne mesure, ont également procédé à des fouilles dans leur sous- sol jusqu'à une profondeur de 200m. Ils y ont trouvé des restes de fibre de verre. Il s'est avéré qu'elles avaient environ 2000 ans. Les Américains en ont conclu que leurs ancêtres disposaient déjà il y a 2000 ans d'un réseau de fibre de verre numérique. Et cela, 1000 ans avant les Russes !

Une semaine plus tard, à Marseille, côte bleue, on a publié le communiqué suivant : « Suite à des fouilles dans le sous-sol de la plage de Carry le Rouet, jusqu'à une profondeur de 500m, les scientifiques marseillais n'ont rien trouvé du tout. Ils en concluent que les Anciens Provençaux disposaient déjà il y a 5000 ans d'un réseau Wifi. Ce n'est qu'un peu plus tard que Dieu inventa le pastis afin d'éviter que les Marseillais ne deviennent les maîtres du monde... »


[Envoyé par ma tante. Mis en ligne car la Provence me manque...]